L’espoir.
C’est d’abord de ne pas le percevoir. De ne pas le saisir de ne pas même arriver à le nommer. C’est avant tout de n’en avoir aucune idée.
Écoute.
Ralentis. Arrête. Observe le monde si loin là-bas. Regarde ta solitude du coin de l’œil. Scrute l’absence et fixe le vide un instant. Tend l’oreille à ce qui te traverse l’esprit. À tout ce qui surgit. Écoute attentivement. Écoute le vrai, le spontané.
C’est bien vite la peur. La peur de constater que ta maladie elle est grave. Ta folie obsédante. Ton anorexie tenace et ton découragement immense. C’est d’être certaine que tu n’as ni la force ni l’énergie de t’en extirper mais c’est de penser tout d’un coup une parcelle de seconde que tu es plus maline que ça. Que tu as le tour de l’impossible. Que tu sais soulever les montagnes et déchiffrer les énigmes insolvables.
Attrape ton reflet dans le miroir et déclare-lui que ça suffit. Brasse-toi la cage de corps. Bondis dehors. Quête une caresse. Arme-toi de patience.
Ensuite c’est d’oser. C’est de croire que tu mérites mieux que les grands coups de restrictions et de règlements que tu t’infliges au quotidien.
Parle.
Laisse le monde s’approcher. Raconte ton histoire. Décris ton état. Fais cent détours et ajoute mille détails. Prends des notes et des rendez-vous. Au salon de thé, à l’école, au parc, à l’hôpital.
Et puis c’est de répéter. Que ton corps. Ton image. Que ta honte. Que tes drames tes échecs tes tempêtes et tes grisailles. Que ta faim que ta faim que tout ça te dévore.
Prends soin de tes sagesses. Sème. Cultive quelques douceurs. Sème encore. Positionne l’inconnu. Entoure-toi de risques. Des fruits frais dans un bol sur la table. Une soupe avec une amie demain. Un sachet de noix dans ton sac à dos. Tous les samedis à la boulangerie tous les soirs une tartine surtout ne négocie pas. Déjoue ta dépendance. Court-circuite tes réflexes.
C’est très souvent d’être terrorisé. C’est d’être à bout de souffle c’est de dire je ne peux pas je ne peux pas je ne peux pas je te jure c’est de continuer c’est de t’accrocher c’est de persister c’est de tenir la route et le cap en demandant du carburant pour ton moteur et du vent pour tes voiles.
Allez roule allez vole.
Attrape toute l’aide que tu peux au passage.
Depuis le début jusqu’à maintenant c’est sans cesse le chemin. L’interminable et laborieux chemin c’est la tolérance et l’entêtement c’est la crise de larmes avant les repas et la crise de larmes après les repas et les crises de larmes au milieu de la nuit et les rages de faims au milieu de la nuit. C’est le dégel. Le réveil. Ou le grand retour donne-lui le nom que tu veux c’est l’ultra sensibilité c’est le sang qui se remet à circuler c’est l’anxiété qui redouble les émotions qui triplent c’est l’horreur. C’est difficile je sais. C’est une lutte c’est une guerre que tu ne peux gagner sans la mener.
Repère tes alliés. Cherche ton air et tes piliers. Trouve ta roche dans ce monde instable. Une table pour écrire. Un lutrin un chevalet une caméra. Une fenêtre. Un arbre dans ta ville. Ta chanson préférée dans le tapis. Un long bain chez ta mère. Une bougie avant d’aller au lit. Une amulette sous ton oreiller. Choisis. Essaie. Rate.
C’est tout ça. L’espoir c’est ce qui meurt en dernier. L’espoir c’est ce que tu ne peux pas tuer.
Ressens-le. Pointe-le. Tolère-le. Invite-le à entrer. Tends-lui une chaise et une assiette. Écoute. Parle. Intéresse-toi à lui. Prends le temps d’une tisane et de biscuits il est doux il n’est là que pour toi il veut juste la paix.
L’espoir existe sans arrêt. Il t’attend.
Allez go. Dis-toi que tu y crois.
Véronique Bachand.
Crédits photo: Danielle Villeneuve
Quel beau témoignage. Ma fille chérie souffre d’anorexie/boulimie depuis plus de 5 ans. La maman que je suis se sent impuissante devant cette maladie destructrice. J’ai confiance qu’elle réussira à vaincre ce trouble alimentaire dévastateur. Elle est belle et pleine de potentiel. Merci Véronique pour ce beau texte. Bonne chance à toi.
salut véro, vraiment beau témoignage. j’adore ta plume et tu es si inspirante.
Je sais que les parents ce sentent très impuissant!!! Car quand je vois mon père atristé ou ma mère pleurer sa me encore plus mal…. Mais le mal est toujours là 24h sur 24 et c’est un combat infernal!!!! Moi sa fais 30 ans que je suis anorexique et en plus j’ai le tpl bordeline et présentement je n’ai plus de qualité de vie!!! Comme l’expression de mes médecins je marche sur un file de fer car ma santé est très critique donc je vie une journée à la fois dans ma noirceur de l’âme et de mon corps!!!! Je suis fatigué,écoeuré et la seule chose que j’ai pour connaître dans ma journée un peu de plénitude c’est la mutilation et après le mal reviens voici ma routine… Car de toute façon je suis dans un isolement total crise de panique,anxiété au max,plus capable de conduire ni d’aller dans aucun endroit public toute seule alors je suis moi et je suis toujours evec mon moi-même….. Je ne souhaiterais pas sa à personne et je voudrais même pas que quelqu’un vive dans mon corps 5 min car il ne le supporterais pas!!! Alors pour toutes personnes qui vivent avec cette maladie destructive je vous comprends et je suis de tout coeur avec vous xxxx et pour ceux qui nous a quittez c’est dure à dire mais aujourd’hui ils connaissent la paix et la plénitude intérieur et mental bisouxxxxxxxxx Peace and love!!!!!