
Le temps des fêtes approche à grands pas, au grand bonheur de plusieurs. Mais pour certains, cette période n’est pas synonyme de joie, de retrouvailles familiales ni de détente. Pendant longtemps, je faisais partie de cette deuxième catégorie.
Il y a six Noëls, ma vision de cette fête était bien différente. Mon « succès » se mesurait par le nombre de plats que j’évitais, par la quantité de repas que je parvenais à fuir. Je n’ai que très peu de souvenirs de cette année-là, à l’exception de l’angoisse constante qui m’accompagnait et du tourbillon de mensonges que je tissais pour esquiver les repas trop copieux. C’était un combat silencieux, épuisant et solitaire.
Il y a quatre Noëls, j’ai décidé de réécrire cette histoire : mais effacer des années de comportements profondément ancrés n’a pas été simple. À chaque repas, mon esprit me criait de ne pas trahir mes habitudes, de ne surtout pas me « laisser aller ». Peu à peu, la culpabilité s’est dissipée, mais chaque petit progrès était une victoire durement acquise.
Il y a deux Noëls, la bataille était enfin terminée. Après des années de travail constant, de petites victoires et d’efforts incessants, je retrouvais doucement mes petits bonheurs d’enfant – comme un chocolat chaud lors d’une marche, ou la traditionnelle fondue de mes parents. Sans crainte, ni jugement.
Cette année, je me considère chanceuse de pouvoir profiter pleinement des fêtes, sans me soucier de mon assiette ni du regard des autres. Mais je n’oublie pas les épreuves des années passées, et c’est pourquoi il me semble essentiel d’adresser certaines réalités.
Car même si je suis aujourd’hui rétablie, même si ces pensées ne sont plus que des murmures que je parviens facilement à écarter, la période des fêtes reste semée de défis. Parfois, sans le savoir, nos proches peuvent rendre cette tâche encore plus difficile. Combien de fois ai-je entendu des collègues ou des amis dire innocemment : « Ouf, je vais devoir jeûner après ce brunch! » ou encore « C’est Noël, les calories comptent pas! » ?
Ces petites remarques sur la nourriture ou le poids, ces pressions liées aux repas de fête ou même le simple fait de sortir de notre routine… Rien de tout cela n’allège le fardeau de celles et ceux pour qui s’alimenter reste un défi quotidien.
Quand on essaie de se convaincre que le ciel ne nous tombera pas sur la tête si on participe aux festivités, un simple commentaire peut suffire à faire basculer l’équilibre fragile qu’on a mis tant d’efforts à construire. Ce que certains prennent pour une remarque anodine peut raviver des peurs enfouies, devenir une source de doute et d’anxiété.
C’est là que la bienveillance devient primordiale : pour ceux qui souffrent d’un trouble de l’alimentation, mais aussi pour leurs proches. Chers parents, amis, frères et sœurs, votre présence et votre compréhension sont essentielles pour alléger ce fardeau souvent invisible.
Aucun geste n’est trop petit : offrir une oreille attentive, créer un environnement de repas sans pression, se concentrer sur le partage du moment plutôt que sur la nourriture, proposer de goûter ensemble à un plat si cela semble difficile… Mais surtout : éviter autant que possible de commenter sur les portions, les choix alimentaires ou les apparences. Prendre le temps de comprendre ce que vit votre proche et l’accepter sans jugement, c’est un véritable cadeau, un acte de solidarité.
Et à tous ceux et celles qui se reconnaissent dans mes mots, je vous souhaite une grande indulgence envers vous-mêmes en cette période de fêtes. Je vous souhaite aussi, plus que tout, de l’espoir. Car, avec du soutien (et bien entendu, une bonne dose de persévérance), les Fêtes peuvent bel et bien retrouver la magie d’avant.
Aurélie