Laissez-moi vous raconter cette séance photos. Celle où l’on m’a fait l’honneur d’être sur le cover. C’était « big » pour moi.
Je me suis entraînée comme une bonne, au gym, pour tenter de ressembler aux grandes amazones des revues. J’ai sué, je me suis privée et restreinte des petits plaisirs gustatifs, des jours avant le « shooting ».
Je suis arrivée là-bas, on m’a vêtue des plus belles robes. Celles que je ne pourrai jamais me payer. On m’a mise des faux cils, des crèmes, des huiles, des fards. On a passé des heures à m’éclairer afin que ma peau soit impeccable, immaculée de pores. On a même placé une immense « fan » devant moi pour la jouer glamour (pour faire semblant que mes cheveux volent au vent de façon naturelle).
Je me sentais à mon top. Parfaite.
Quelques semaines plus tard, j’ai vu au dépanneur mon « cover ». Quelqu’un devant son ordinateur, avait allongé mes cuisses et réduite ma taille. Il avait aussi blanchi mes dents, bonifié mes yeux de lumières et lustré ma peau. C’était sa vision de la beauté.
Cette vision n’était pas moi. Je n’étais pas à cette séance photos.
C’est cette journée là que j’ai compris que même les amazones des revues ne ressemblent pas à l’image qu’elles projettent sur le papier glacé. Et que j’aimais mieux profiter des plaisirs de la vie plutôt que de tenter d’atteindre une perfection inatteignable.