30 à 50% des gens obèses qui suivent un traitement de perte de poids présentent tous les critères diagnostiques de l’hyperphagie boulimique (Spitzer & al., 1992). Il devient donc important d’en prendre compte lorsque le thérapeute prend en charge une personne souffrant d’obésité. Et surtout ne pas oublier que parfois, un seul régime restrictif peut faire basculer une personne dans un trouble alimentaire.
Mais qu’est-ce que l’hyperphagie boulimique?
L’hyperphagie boulimique est considérée comme un trouble alimentaire mais reste méconnue des professionnels de la santé. Malheureusement on confond souvent la boulimie à l’hyperphagie boulimique. L’hyperphagie boulimique fait partie des troubles alimentaires non spécifiés (TANS) contrairement à l’anorexie mentale et à la boulimie qui sont reconnues comme des troubles des conduites alimentaires. Une personne qui souffre d’hyperphagie boulimique est en surpoids alors qu’une personne qui souffre de boulimie a souvent un poids normal. Les critères diagnostiques qui permettent de décrire cette pathologie de façon plus précise sont présentés au tableau 1.
Tableau 1 : Critères diagnostiques de l’hyperphagie boulimique
Comment se développe l’hyperphagie boulimique?
L’expérience clinique démontre que l’hyperphagie boulimique émerge sous deux conditions importantes. Premièrement, le vécu dans le développement de l’image corporelle. Un commentaire négatif sur notre poids, notre propre insatisfaction de notre image corporelle, la pression de notre entourage à perdre du poids pour notre apparence ou notre santé sont tous des facteurs affectant le développement de notre image corporelle. Et puis, il suffit d’un premier régime restrictif pour développer une forme d’addiction. Inévitablement, la restriction alimentaire nous conduira à la compulsion alimentaire. Le cercle infernal de perte et de reprise de poids se met ainsi en place. Deuxième condition d’émergence, l’hyperphagie boulimique peut se développer à partir des expériences vécues avec la nourriture et les émotions, c’est- à-dire que lorsque le rapport nourriture-émotion est distordue. Les expériences réconfortantes et apaisantes vécues en mangeant deviennent la seule bouée de secours à la gestion des émotions, d’où le dicton « Manger ses émotions ». Or, toutes ces modifications peuvent favoriser le cercle vicieux d’une reprise de poids qui sera trop souvent plus sévère. En tenant compte de tous ces facteurs, il serait donc possible de dire que maigrir fait grossir. Et il devient d’autant plus important d’éviter de suggérer aux personnes souffrant d’hyperphagie boulimique de suivre un régime, quel qu’il soit, car les régimes sont à la base de cette pathologie.
Les solutions?
•Sortir du cercle infernal des régimes
•Retrouver un équilibre de vie physiquement et mentalement
•Apprendre à apprivoiser et gérer nos émotions autrement que par la nourriture
•Retrouver plaisir à manger sainement
On nous dira que c’est souvent facile à dire mais difficile d’exécution…Mais il ne faut surtout pas hésiter à consulter pour se faire aider.
Bonne réflexion!
Josée Guérin Dt.P. Nutritionniste et psychothérapeute
Présidente et fondatrice de la Clinique psychoalimentaire
Membre du conseil d’administration d’ANEB
Références
AMERICAN PSYCHIATRIC ASSOCIATION. MINI DSM-IV. Critères diagnostiques (Washington DC, 1994). Traduction française par J.-D, Guelfi et al., Masson, Paris 1996, 384 pages.
Spitzer, R. L., Devlin, M., Walsh, B.T., Hasin, D., Wing, R., Marcus, M., et al. (1992). Binge eating disorder: A multisite field trial of diagnostic criteria. International Journal of Eating Disorders, 11, 191-203.